Questions de science
et de technologie


 E. Macron

Je vous rejoins tout à fait sur le lien entre recherche, innovation et essor économique, dans une économie de la connaissance qui reste encore largement à conquérir. Les liens entre la recherche et l’innovation sont indéniables. Mais ils sont extrêmement complexes, les temps sont différents, parfois très longs, et nous sommes aussi dans le domaine de la chance et du risque. Ce sont des risques qui relèvent pour une bonne part de l’intervention de la puissance publique.
L’enjeu de ce point de vue est en effet de trouver le bon équilibre entre crédits récurrents et appels à projets. Les uns et les autres ont leur efficacité pour la recherche « fondamentale » et la recherche « appliquée » entre lesquelles la frontière est d’ailleurs de moins en moins nette. le deuxième enjeu pour l’action publique est d’encourager nos industries à se tourner vers les sciences fondamentales pour trouver des solutions nouvelles, et d’accompagner nos chercheurs pour que leur recherche soit plus facilement transformée en « applications ».
Concernant le Programme d’Investissement d’Avenir, nous avons suffisamment de recul maintenant pour pouvoir dire que son utilité est avérée. D’autres questions se posent désormais : la diversification des sources de financement , ou l’évolution des Labex en instituts ou en écoles universitaires de recherche (« graduate schools »).
D’autre part, l’ANR remplit bien sa mission, malgré un taux de succès trop bas, comme cela est le cas des programmes européens. Cela constitue un véritable problème car beaucoup de projets de très haute valeur restent dans les cartons, et cela représente un coût non négligeable – le temps passé à préparer un dossier est un temps perdu pour la recherche. Nous devrons donc y travailler : préciser les attendus et les impacts, recalibrer les appels, rapprocher les programmes « recherche », comme ceux de l’ANR, des programmes qui soutiennent l’innovation industrielle et la recherche-développement.
Sur le plan budgétaire, je considère plus généralement que notre modèle de financement récurrent et d’emplois pérennes constitue un avantage par rapport à d’autres pays car il valorise la liberté des chercheurs, la prise de risque, et donne le droit à des périodes d’exploration qui sont des conditions nécessaires à la découverte. Mais je crois aussi, d’autre part, que le modèle de financement par appels à projet, y compris donc pour la science fondamentale – songeons au Conseil Européen de la Recherche –, apporte beaucoup sous ce rapport. Cela permet notamment à de jeunes chercheurs de faire plus rapidement leurs preuves, et cela facilite l’éclosion d’idées neuves. Mais je ne souhaite pas m’engager aujourd’hui sur des chiffres : je ne peux pas d’un côté dire que les établissements seront libres de leurs recrutements, que l’Etat les soutiendra par voie contractuelle, et dire en même temps quels seront les budgets récurrents. De même pour les appels à projets : nous ouvrirons des chantiers de recherche et d’innovation pour la transition énergétique, la recherche agricole, marine et maritime, environnementale ainsi que pour la santé, qui concerneront les universités et les organismes. Les montants exacts seront précisés en temps voulu, mais les trajectoires sont posées : nous augmenterons les budgets récurrents, par voie contractuelle, et nous augmenterons les budgets consacrés aux appels à projets.